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La généalogie en France, aux Antilles et en Nouvelle-France

vendredi 22 février 2013, par Nicolas Prévost

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De plus en plus de personnes s’intéressent, et même se passionnent, pour leurs origines familiales, et pratiquent ce qu’on appelle la généalogie. En France et au Québec, il est possible de remonter très loin car les documents sont nombreux et pour la plupart bien conservés, notamment les registres paroissiaux et d’état civil.

Les registres paroissiaux, la mémoire de nos ancêtres

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Ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539
Archives nationales

En France, le roi François Ier signe en 1539 l’Ordonnance de Villers-Cotterêts, qui oblige les curés de l’ensemble des paroisses de France à tenir un registre des baptêmes. Cette Ordonnance oblige également que ces registres soient tenus en langue française et non pas en latin. Quelques années plus tard, en 1542, le Concile de Trente demande d’inscrire sur les actes de baptême les noms du parrain et de la marraine.

En 1579, l’Ordonnance de Blois signée par Henri III étend l’obligation de tenue des registres aux mariages et aux sépultures. Bien entendu, il faut beaucoup de temps pour que ceci s’organise véritablement et la plupart des registres ne commencent qu’au début des années 1600.

Le Code Louis (Ordonnance de Saint-Germain-en-Laye d’avril 1667) impose la tenue de ces registres en double exemplaire, l’un (la « minute ») restant dans la paroisse et l’autre (la « grosse ») étant transmis au greffe du tribunal le plus proche. Mais ce n’est qu’à partir de la déclaration du 9 avril 1736 que les registres paroissiaux sont tenus systématiquement en double dans toutes les paroisses de France.

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Dans le registre paroissial de Saint-Lubin-des-Joncherets (Eure-et-Loir), acte du mariage de Jean Voisin et de Françoise Jan de Hauteterre le 28 mai 1685 par le curé de l’église Saint-Lubin
Archives départementales d’Eure-et-Loir

Sous le règne de Louis XVI, l’Édit de Versailles du 19 novembre 1787 (dit aussi « Édit de tolérance ») demande aux prêtres catholiques d’enregistrer également dans leurs registres les naissances, mariages et décès des personnes juives, protestantes et athées.

Les registres paroissiaux dans la France d’Outre-Mer

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Première page du registre paroissial de 1788 de la paroisse Saint-Sauveur de Cayenne (Guyane)
Archives nationales d’outre-mer

Le système des registres paroissiaux est dès sa création immédiatement étendu à l’ensemble des territoires français, en particulier en Nouvelle-France, mais aussi aux Antilles, en Guyane, à la Réunion, au Sénégal, à Pondichéry...

En raison de l’éloignement, des intempéries fréquentes et donc de la fréquente détérioration des archives, un édit du roi Louis XVI de juin 1776 (enregistré à la Chambre des comptes le 15 avril 1777) impose la tenue des registres d’outre-mer en trois exemplaires dont l’un devait être envoyé à Versailles. C’est ce qu’on appelle la loi sur le Dépôt des Papiers Publics des Colonies (DPPC), dit aussi Dépôt de Versailles. C’est ainsi que doivent y être conservés les duplicatas des registres paroissiaux, des registres d’inhumation des hôpitaux, des minutes notariales, des minutes des greffes judiciaires, des actes d’affranchissement, des relevés des passagers. Cette décision royale nous permet aujourd’hui d’avoir accès à des archives très anciennes pour les Antilles françaises, ce qui n’est souvent pas le cas pour d’autres pays de la zone caraïbe. Il faut aussi noter que l’édit de Louis XVI de 1776 avait un effet rétroactif.

Le plus ancien registre de la Martinique date de 1671 pour la paroisse d’Anse d’Arlet. Pour la Guadeloupe, le plus ancien date de 1715. Enfin, pour la Guyane française, les registres remontent à 1677.

On trouve aussi les registres des anciens territoires français antillais, comme ceux de Saint-Domingue (Haïti) et de Sainte-Lucie (île française passée sous le contrôle anglais après les défaites napoléoniennes de 1814-1815). Pour Saint-Domingue, le plus ancien registre date de 1666 et concerne, pour l’actuelle commune de Léogâne, la paroisse de l’Île Sainte-Croix.

La plupart des fonds d’Archives de l’Outre-Mer se trouvent aujourd’hui aux Archives nationales de l’Outre-Mer à Aix-en-Provence. En plus de l’Algérie et d’un grand nombre de territoires de l’ancien empire français, on peut consulter en ligne pour les territoires américains les registres paroissiaux et d’état civil pour :

- Saint-Pierre-et-Miquelon de 1763 à 1907

- l’Île Royale (en Acadie, aujourd’hui Île du Cap-Breton) de 1715 à 1758

- l’Île Saint-Jean (en Acadie, aujourd’hui Île du Prince-Édouard) de 1721 à 1758

- la Louisiane de 1720 à 1734

- la Guyane française de 1677 à 1907

- la Martinique de 1662 à 1912

- la Guadeloupe de 1639 à 1925

- Saint-Barthélémy de 1773 à 1905

- Saint-Martin de 1773 à 1907

- Saint-Domingue (Haïti) de 1666 à 1809

- Saint-Lucie de 1751 à 1789

Les registres paroissiaux en Nouvelle-France

Le premier baptême en Nouvelle-France le 24 octobre 1621 à Québec
Ce premier baptême au Québec est celui d’Eustache Martin, fils d’Abraham Martin et de Marguerite Langlois. Son parrain est Eustache Boullay [orthographié aussi Boullé, frère d’Hélène Boullé et beau-frère de Samuel de Champlain] et sa marraine est Guillemette Hébert, épouse de Guillaume Couillard.
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Bibliothèque et Archives nationales du Québec
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La petite église de Tadoussac : en rédigeant et conservant les registres paroissiaux, les curés de Nouvelle-France permettent aux Québécois d’aujourd’hui de découvrir leurs origines
Photo N. Prévost

La ville de Québec est fondé en 1608 par Samuel de Champlain et le premier registre paroissial de Nouvelle-France est rédigé à partir de 1616 par les prêtres catholiques. L’ensemble des paroisses possèdent alors ces registres, dont la ville de Montréal fondée en 1642 par Paul Chomedey de Maisonneuve.

Parmi les registres paroissiaux les plus anciens conservés au Québec, on trouve ceux de Notre-Dame de Québec (1621), de l’Immaculée-Conception des Trois-Rivières (1634), de la Mission de Saint-Joseph de Sillery (1638), de Notre-Dame de Montréal (1642), de Sainte-Anne-de-Beaupré (1657)...

Dès 1663, la province de Nouvelle-France est dotée de toutes les structures administratives françaises : aux registres paroissiaux s’ajoutent aussi les études des notaires.

En 1678, le Conseil Souverain de la Nouvelle-France enregistre l’ordonnance de Saint-Germain-en-Laye d’avril 1667 qui impose la tenue des registres en double exemplaire. Cela a pour effet que les pertes ont été très limitées, et que les Canadiens d’origine française peuvent souvent retrouver leurs ancêtres dès l’origine de la colonie et donc connaître qui sont leurs ancêtres qui ont émigré depuis la métropole dans les années 1600 !

Dès le début du 17ème siècle, les curés inscrivent de nombreuses informations sur les actes de baptêmes : on y trouve la date du baptême (avec sous-entendue la date de naissance par des formules comme "né hier" ou "né de ce jour"), les différents prénoms du baptisé, les noms et prénoms du père et de la mère, la paroisse d’origine ainsi que les noms et prénoms du parrain et de la marraine.

Les registres paroissiaux du Québec sont conservés à la Bibliothèque et Archives nationales du Québec ainsi qu’aux archives diocésaines. Ils sont consultables, numérisés et en ligne, sur le site Family Search pour la période allant de 1621 à 1900.
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Acte de mariage de Jean Toupin et de Marie Gloria (tous les deux originaires de Normandie) le 3 juin 1669 en la paroisse Notre-Dame à Québec

Les registres paroissiaux en Acadie

Fondée au même moment que la Nouvelle-France, l’Acadie disposait elle aussi des mêmes institutions. Mais cette malheureuse région de l’Est du Canada, abandonnée par la France en 1713, a vu ses habitants victime de la déportation opérée par les Anglais en 1755. La plupart des registres acadiens ont donc malheureusement été détruits et il est très difficile d’établir une filiation précise. Il existe toutefois des dictionnaires généalogiques des familles acadiennes, mais ils souffrent du manque de sources.

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Photo N. Prévost
Un registre acadien a été miraculeusement conservé, il s’agit du registre paroissial de l’église Saint-Jean-Baptiste de Port-Royal, pour la période allant de 1702 à 1755. On peut le consulter en ligne sur le site du gouvernement de Nouvelle-Écosse.

Toujours concernant l’Acadie, on peut aussi consulter les registres paroissiaux de l’Île Royale (où se trouvait la forteresse de Louisbourg) ainsi que les registres paroissiaux de l’Île Saint-Jean sur le site des Archives nationales françaises d’Outre-Mer pour la période allant de 1715 à 1758.

Les registres paroissiaux de Beaubassin et de ses environs (Rivière-des-Mines, Les Mines, Chipoudy, Jemsek, Missions du Nouveau-Brunswick, Petitcoudiac et église de la Sainte-Famille-de-Pabos en Gaspésie) pour la période 1679-1686 et 1751-1757 sont conservés, avec des lacunes importantes, aux Archives nationales du Canada à Ottawa, on peut ici voir la description du fond.

Enfin, le diocèse de Bâton-Rouge en Louisiane conserve les registres paroissiaux de la paroisse Saint-Charles-des-Mines de Grand-Pré pour la période de 1707 à 1748. Ces registres ont miraculeusement survécu, comme l’explique cet article.

La collection Drouin

L’institut généalogique Joseph Drouin a microfilmé un grand nombre de registres paroissiaux de l’Amérique française (environ 39 millions d’images et fiches) : registres paroissiaux du Québec (1621-1967), registres des paroisses catholiques françaises de l’Ontario (1747-1967), registres des paroisses catholiques françaises des États-Unis (1695-1954), registres de l’Église catholique française d’Acadie (1647-1942), actes notariés du Québec (1651-1941) et divers documents et dossiers français (1651-1941).

L’état civil contemporain en France

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La création de l’état civil pendant la Révolution française (registre de l’an VI de Bernay en Normandie)
Archives départementales de l’Eure

En 1792, pendant la Révolution française, le décret du 20 septembre 1792 crée l’état civil moderne. Un deuxième décret, le 25 septembre 1792, retire au curé l’obligation de tenir ces registres, qui seront désormais conservés en mairie, à partir du 1er janvier 1793. Bien entendu, les curés continuent à tenir leurs registres de baptêmes, mariages et sépultures célébrés dans leur église, registres que l’on nomme dorénavant registres de catholicité et qui sont détenus soit aux archives départementales, soit aux archives de chaque diocèse. Les révolutionnaires obligent également les curés à déposer l’ensemble des registres antérieurs à 1793 dans les mairies, les tribunaux ou aux archives départementales.

La loi du 13 fructidor an VI (30 août 1798) impose de célébrer les mariages au chef-lieu de canton et crée des registres spéciaux pour cela. Cette obligation est supprimée le 25 juillet 1800. Les mariages célébrés entre ces deux dates sont donc à chercher dans ces registres spéciaux.

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Première page du registre d’état civil de 1888 de la commune de Case-Navire (Schoelcher) (Martinique)
Archives nationales d’outre-mer

Le divorce est autorisé à partir de 1792 puis interdit par la loi du 8 mai 1816 sous Louis XVIII, pendant la Restauration. Il est de nouveau autorisé à partir de la 3ème République par la loi du 27 juillet 1884, complétée par la loi du 18 avril 1886 qui oblige d’indiquer le divorce en marge de l’acte de mariage concerné.

L’état civil se complète à partir de la loi du 17 août 1897 avec l’annotation, en marge (« mention marginale ») de l’acte de naissance des informations (date, lieu et nom du conjoint) concernant le mariage et le divorce. À partir de la loi du 22 octobre 1922, il est obligatoire dans les actes de naissance d’indiquer également la date et le lieu de naissance des parents. Enfin, à partir de la loi du 29 mars 1945, le lieu et la date de décès sont également inscrits en marge de l’acte de naissance. Ces mentions marginales, à une époque où la population est très mobile, facilitent bien sûr grandement les recherches généalogiques pour la période contemporaine.

Les destructions de registres en France, notamment à Paris

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En 1860, Paris passe de 12 arrondissements (la zone en bleu) à 20 arrondissements (la zone délimitée par le trait rouge) en annexant des communes limitrophes de la proche banlieue
Archives de Paris

Parmi les villes françaises, Paris fait figure d’exception car c’est une des rares villes à avoir perdu la plus grande partie de ses archives. La capitale disposait depuis le 16ème siècle d’un nombre très important de registres paroissiaux, du fait de sa taille et du nombre très élevé de paroisses, une magnifique et inestimable collection. Suite à la loi du 25 septembre 1792, tous les registres paroissiaux parisiens sont placés dans les 12 mairies d’arrondissement et les doubles sont déposés au tribunal dans l’île de la Cité.

En 1860, sous l’Empereur Napoléon III, Paris agrandit son territoire et passe de 12 à 20 arrondissements, englobant alors des communes de la toute proche banlieue (Montmartre, La Chapelle, La Villette, Belleville, Charonne, Bercy, Vaugirard, Grenelle, Auteuil, Passy et Batignolles-Monceau, ainsi qu’une partie des communes de Neuilly-sur-Seine, Clichy-la-Garenne, Saint-Ouen, Aubervilliers, Pantin, Le Pré-Saint-Gervais, Bagnolet, Saint-Mandé, Ivry-sur-Seine, Gentilly, Vanves, Montrouge et Issy-les-Moulineaux). Comme les 20 arrondissements créés sont totalement repensés et qu’ils diffèrent complètement des 12 anciens, l’ensemble des registres paroissiaux antérieurs à 1792 et les registres d’état civil pour la période 1793-1860 sont alors placés à l’hôtel de ville central de Paris, tandis que les doubles sont entreposés au tribunal de l’île de la Cité.

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L’hôtel de ville entièrement détruit après l’incendie de 1871. Il sera reconstruit mais les archives seront, elles, définitivement perdues.
Archives de Paris

Malheureusement, pendant la Commune de Paris, les communards incendient volontairement en mai 1871 l’hôtel de ville de Paris mais aussi le tribunal. Plus de huit millions de documents, état civil, actes de baptêmes, de mariage, de sépultures, d’anonymes ou de célébrités, représentant toute la mémoire parisienne et les plus grands moments de l’histoire de France, disparaissent totalement en quelques heures. De ce fait, il est très difficile de retrouver des ancêtres parisiens avant 1860. Heureusement, beaucoup de parisiens de cette époque ont des origines provinciales, ce qui atténue les lacunes des archives. D’autre part, l’ensemble des communes de la banlieue parisienne, y compris celles se trouvant dans l’ancien département de la Seine, ne sont heureusement pas concernées par l’incendie de 1871, et disposent de tous leurs registres depuis l’origine.

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Suite aux destructions de 1871 et à la loi de 1872, acte d’état civil reconstitué du mariage de Victor Prévost et de Marie-Hélène Foerster le 21 juillet 1855
Archives de Paris

Suite à ces destructions (qui auraient pu aussi toucher les archives nationales, mais un des communards a finalement refusé au dernier moment d’allumer le feu), la loi du 12 février 1872 ordonne la reconstitution de l’état civil parisien antérieur à 1860. Ce travail titanesque dure jusqu’en 1896 et permet de reconstituer près de trois millions d’actes, datant pour la plupart du 19ème siècle. Cette reconstitution des actes, pas toujours précise, a été essentiellement établie à partir de papiers de familles, extraits d’actes paroissiaux, actes notariés, et aussi grâce aux registres de catholicité depuis 1793, qui eux n’avaient pas disparu dans l’incendie de 1871, étant restés dans les paroisses. Mais la grande majorité des données, concernant notamment les familles sans postérité, est perdue à jamais.

D’autres villes et départements français ont connu aussi de grandes vagues de destructions : surtout pendant les deux guerres mondiales. C’est le cas dans la Somme, dans l’Aisne, également en Alsace, mais aussi dans la Manche. Il y a eu aussi des destructions liées au temps, à la mauvaise conservation, à l’humidité. Mais dans l’ensemble, on dispose encore de la très grande majorité des registres depuis le début du 17ème siècle !

En France, la plupart des registres paroissiaux et d’état civil des origines au début du 20ème siècle ont été numérisés et beaucoup sont mis en ligne gratuitement sur Internet par les services d’archives départementales. C’est le cas notamment de Paris, des Yvelines, de l’Essonne, de l’Eure, de l’Eure-et-Loir, de l’Orne, de la Manche, de l’Aisne, de l’Yonne, de l’Oise, des Bouches-du-Rhône, du Var, des Alpes-Maritimes...

L’état civil en Haïti

Vous pouvez aussi lire ce passionnant article écrit par l’Association de généalogie d’Haïti sur les archives de l’état civil qui se trouvent aux Archives nationales d’Haïti :
http://www.agh.qc.ca/articles/?id=68

L’état civil contemporain au Québec

Cédée aux Anglais en 1763, la Nouvelle-France, devenue le Québec, n’a pas connu les bouleversements de la Révolution française. Après la période de troubles des années 1760, l’Acte de Québec promulgué par les Anglais en 1774 restaure les prérogatives de l’Église catholique et les institutions françaises telles qu’elles existaient, notamment le droit civil français. Les curés catholiques québécois continuent donc à tenir les registres paroissiaux où ils notent les baptêmes, les mariages et les sépultures. En 1795, les autres confessions religieuses doivent également figurer dans les registres.

Un acte de naissance québécois du 19ème siècle :
l’acte de baptême du Premier ministre canadien Wilfrid Laurier (1841-1919)

Wilfrid Laurier, de son complet Henry Charles Wilfrid Laurier, est né le 20 novembre 1841 à Saint-Lin-de-Lachenaie (actuellement Saint-Lin-Laurentides) et il est baptisé le 22 novembre 1841 en l’église de Saint-Lin. Baptême n° 128 - Henry Charles Wilfrid Laurier - Ce vingt deux novembre mil huit cent quarante un, nous prêtre soussigné avons baptisé Henry Charles Wilfrid né avant hier du mariage de Sieur Carolus Laurier, clerc arpenteur, et de Dame Marie Marcelle Martineau de cette paroisse. Parrain Louis Charles Beaumont, Marraine Marie Zoë Laurier soussignés ainsi que le père.
Signé : L.C. Beaumont ; M. Zoé Laurier Beaumont ; Carolus Laurier ; G. Chabot, prêtre.

Il faut attendre 1875 pour la création d’un enregistrement non confessionnel au Québec pour les naissances, et 1969 pour les mariages. Depuis le 1er janvier 1926, les naissances, mariages et décès sont déclarés auprès du Registre de référence à l’état civil. Enfin, les mentions marginales de mariage sont indiquées depuis 1907 en marge des actes de baptême catholique.

Un acte d’état civil québécois contemporain :
le baptême du Premier ministre canadien Pierre Eliott Trudeau (1919-2000)

Pierre Eliott Trudeau, de son nom complet Joseph Philippe Pierre Yves Elliotte Trudeau, est né le 18 octobre 1919 à Outremont (actuel arrondissement de Montréal) et il est baptisé le 20 octobre 1919 en l’église Saint-Viateur d’Outremont. Son acte de baptême catholique est donc en même temps un acte d’état civil.
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Paroisse Saint-Viateur d’Outremont (Québec)

Baptême n° 46 - Joseph Philippe Pierre Yves Trudeau
Le vingt octobre mil neuf cent dix-neuf, nous, prêtre soussigné, avons baptisé Joseph Philippe Pierre Yves Elliottele dix-huit, fils légitime de Joseph Charles Émile Trudeau, avocat qui a signé, et de Grace Elliott de cette paroisse. Le parrain a été Joseph Trudeau, rentier de St-Rémi qui a signé, et la marraine Malvina Cardinal qui a signé. Lecture faite.
Signé : Malvina Cardinal ; E. Trudeau ; J. Chs. Trudeau ; J.A. Perrault, prêtre, C.S.V.

Cyprien Tanguay, le père de la généalogie au Québec
Cyprien Tanguay est né à Québec le 15 septembre 1819. Après ses études au séminaire de Québec, il est ordonné prêtre en 1843, puis devient curé de Rimouski. En 1865, il est nommé responsable du service de statistiques du Canada. Grâce à des recherches approfondies dans les registres paroissiaux aux États-Unis et au Canada, il rédige et publie le Dictionnaire Tanguay des familles canadiennes, œuvre gigantesque qui permet à de nombreux américains et canadiens de retrouver leurs origines françaises depuis les années 1600. Cyprien Tanguay meurt à Québec le 28 avril 1902.

Reconstituer l’histoire du Canada français à travers ses habitants grâce à la généalogie

Parmi l’histoire des premiers habitants et pionniers français du Canada, le parcours de Martin Prévost est particulièrement intéressant.

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Église Saint-Pierre Saint-Paul de Montreuil
Photo Paroisse de Montreuil
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Plaque dans l’église de Montreuil

Martin Prévost, fils de Pierre Prévost et de Charlotte Vié, est né à Montreuil-sous-Bois près de Paris le 4 janvier 1611 et il est baptisé le même jour dans l’église Saint-Pierre-Saint-Paul. Cette église est très ancienne, elle date du 13ème siècle, de style gothique flamboyant. Dans le baptistère de l’église se trouve aujourd’hui une plaque commémorative rappelant le baptême de Martin Prévost.

Acte de baptême de Martin Prévost le 4 janvier 1611 en l’église Saint-Pierre-Saint-Paul de Montreuil-sous-Bois

Martin Prévost
L’an de grâce 1611 le 4ème jour de janvier a été baptisé Martin fils de Pierre Prévost et de Charlotte Vié, ses père et mère, tenu sur les saints fonds baptismaux par Germain M....., assisté de Raphaël Cornu et de Thomasse C.......

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Archives départementales de la Seine-Saint-Denis à Bobigny

Figurant parmi les pionniers du Canada français, Martin Prévost s’embarque pour la Nouvelle-France en 1638 et le 3 novembre 1644, il épouse à Québec Marie Manitouabe8ich, une amérindienne, fille de Roch Manitouabe8vich et élevée par la religieuse ursuline Marie de l’Incarnation. Le chiffre 8 inséré dans le nom de Marie peut étonner : il ne s’agit pas d’une faute de frappe. Pendant la première moitié du 17ème siècle, la lettre W n’existait pas encore dans l’alphabet français, donc on utilisait dans les manuscrits la lettre o surmontée d’un u. Mais il n’existe bien sûr pas de signe typographique, les imprimeurs utilisaient donc le 8.

Voici ce qu’indique son acte de mariage :

Acte du mariage de Martin Prévost et de Marie Olivier le 3 novembre 1644 en l’église de la Conception de la Vierge Marie à Québec

L’an 1644, le 3ème jour du mois de Novembre. Les bans ayant été publiés par 3 jours de fête de Suite, dont le 1er a été publié le 23ème jour d’octobre, le 2è ban, le 28ème jour, et le 3ème le 30ème jour du même mois d’octobre et ne s’étant découvert aucun empêchement légitime le R.P. Barthélémy Vimont, Supérieur de la mission de la Compagnie de Jésus en ce pays de la Nouvelle-France et tenant place de curé en cette Église de la Conception de La Vierge Marie à Québec, a interrogé Martin Prévost, fils de Pierre Prévost et de défunte Charlotte Vié, sa femme, de la paroisse de Montreuil sur le bois de Vincennes, et Marie Olivier, fille de Roch Manitouabe8ich, Sauvage, et ayant eu leur mutuel consentement et par paroles de présent, les a solennellement mariés et fait la bénédiction nuptiale en l’Église de La Conception à Québec, en présence de témoins connus, Olivier Le Tardif, et Guillaume Couillard de cette paroisse de Québec.

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Bibliothèque et archives nationales du Québec, site de Québec

Quelques semaines plus tard, Martin Prévost achète une terre dans la Seigneurie de Beauport. Le couple a au moins huit enfants, tous baptisés dans l’église de Québec entre 1647 et 1665 :

- Marie-Madeleine Prévost : née le 21 décembre 1647, baptisée le 28 décembre 1647 à Québec, décédée le 5 février 1648 à Québec à l’âge d’un mois et demi

- Ursule Prévost : née le 13 décembre 1649, baptisée le 14 décembre 1649 à Québec, décédée le 1er janvier 1661 à l’âge de 11 ans

- Louis Prévost : né et baptisée en 1651, il épouse d’abord Françoise Gagnon le 21 février 1672 en l’église de Château-Richer (de cette union naîtront 5 enfants) puis Marguerite Carreau le 17 février 1681 en l’église de Château-Richer (de cette union naîtront 4 enfants), il meurt de noyade le 12 mai 1686 à Beauport et est enterré le 27 mai 1686 à Québec à l’âge de 35 ans

- Marie-Madeleine Prévost : née le 7 janvier 1655, baptisée le 13 janvier 1655 à Québec, décédée en mars-avril 1662 à l’âge de 7 ans

- Antoine Prévost : né le 15 octobre 1657 à Québec, baptisé le 23 octobre 1657 en l’église de Québec, décédé le 16 mars 1662 à Québec à l’âge de 4 ans

- Jean Prévost : né le 31 janvier 1660 à Québec, baptisé le 14 février 1660 en l’église de Québec, il épouse Françoise Cadieux le 4 mai 1690 en l’église de Québec (de cette union naît une fille, Marie-Madeleine Prévost), et il meurt en 1694 à Québec à l’âge de 33 ans

- Jean-Baptiste Prévost : né le 16 mai 1662 à Québec, baptisé le 24 juin 1662 en l’église Notre-Dame de Québec (son parrain est Laurent Poulet et sa marraine est Georgette Clément) par le curé Henri de Bernières, il épouse Marie-Anne Giroux le 18 août 1683 en l’église de Beauport (de cette union naîtront 14 enfants), il épouse en seconde noce Geneviève Sedilot le 3 février 1712 en l’église de Sainte-Foy (de cette union naîtront 11 enfants) et il décède le 12 mai 1737 à Saint-Augustin à l’âge de 75 ans

- Thérèse Prévost : née et baptisée le 3 juin 1665 à Québec, elle épouse Michel Giroux le 18 août 1683 à Beauport (de cette union naîtront 12 enfants)

Marie Manitouabe8ich meurt à Québec le 10 septembre 1665

Acte de sépulture de Marie Olivier Manitouabe8ich le 10 septembre 1665 en l’église Notre-Dame à Québec

L’an 1665 le 10ème septembre est décédée en la communion de notre Sainte Mère l’Église après avoir reçu le sacrement viatique et l’extrême onction, Marie Olivier femme de Martin Prévost, et le douzième du dit mois elle a été enterrée au cimetière de Québec par le curé de cette paroisse

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Bibliothèque et archives nationales du Québec

Martin Prévost épouse en seconde noce Marie d’Abancourt le 8 novembre 1665 en l’église de Québec (Marie d’Abancourt était la mère de Louis Jolliet, le célèbre découvreur).

Martin Prévost meurt à Beauport le 27 janvier 1691 et il est inhumé le lendemain.

Acte de sépulture de Martin Prévost le 28 janvier 1691 en l’église de la Nativité Notre-Dame à Beauport

Le vingt-huitième de janvier par moi soussigné curé de Beauport a été enterré dans le cimetière dudit lieu Martin Prévost habitant dudit lieu décédé le jour précédent dans la foi catholique muni de tous les derniers sacrements, âgé pour lors de quatre-vingts ans environ. Présents au dit enterrement Pierre Vachon garçon fils de Maître Paul Vachon notaire de Beauport.

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Bibliothèque et archives nationales du Québec

Les documents paroissiaux et notariés nous permettent donc de reconstituer l’histoire de toutes ces familles.

Martin Prévost est l’ancêtre de la plupart des Prévost d’Amérique, ses descendants se comptent donc par milliers !

D’autres familles ont également de très nombreux descendants en Amérique du Nord, parmi les noms de famille les plus courants au Québec : Tremblay, Gagnon, Côté, Lemieux, Bouchard... Certains villages français ont un lien très fort avec le Canada, comme par exemple Tourouvre dans l’Orne en Normandie, village natal de Julien Mercier, baptisé en l’église Saint-Aubin de Tourouvre le 27 février 1621, et ancêtre du Premier ministre québécois Honoré Mercier (1840-1894).

On pourrait aussi citer Pierre Tremblay, baptisé en l’église de Randonnai (Orne) en 1626, marié le 2 octobre 1657 à Notre-Dame-de-Québec avec Ozanne Achon (originaire de Saintonge), et ancêtre de tous les Tremblay d’Amérique (environ 100.000 descendants) !

Voici leur acte de mariage :

Acte du mariage de Pierre Tremblay et d’Ozanne Achon le 2 octobre 1657 en la cathédrale Notre-Dame à Québec

Pierre Tremblé, Osanne Achon
Le 2 jour d’octobre 1657 après la publication des trois bans faite le 21e, 23e et 30e septembre, et ne s’estant trouvé aucun empeschement je Gabriel de Queylus ay marié avec les solemnités ordinaires en cette église paroissialle Pierre Tremblé laboureur, fils de Philibert Tremblé et Jeanne Coignet ses père et mère, de la paroisse de Randonné au Perche évesché de Chartres, et Osanne Achon fille de Jean Achon et de Hélaine Regnault de la paroisse de Puyravault évesché de la Rochelle en présence de Macé Gravel, Pierre Mance et Mathurin Giraud.

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Bibliothèque et Archives nationales du Québec

De nombreux Canadiens font chaque année le voyage sur les traces de leurs ancêtres français.
Quand la petite histoire rencontre la grande !

Un article récent explique l’engouement pour la généalogie en France, dans toutes les classes d’âge :
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2010/05/02/01016-20100502ARTFIG00222-la-genealogie-nouvelle-passion-de-la-jeunesse-.php
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