Accueil du site > Histoire et mémoire > Les « Arrêts de Marly » de 1711 par Louis XIV

Les « Arrêts de Marly » de 1711 par Louis XIV

vendredi 31 janvier 2014, par Nicolas Prévost

PNG - 176.3 ko
Panneau vers la rue de Marly à Québec
Photo : Google Streetview

Il existe dans la ville de Québec, à l’extrémité de l’arrondissement Sainte-Foy-Sillery-Cap-Rouge, une « rue de Marly ». Cette rue, qui borde un parc de 16 hectares appelé « Boisé de Marly » ou « Boisé Marly », est nommée en l’honneur de la ville de Marly-le-Roi, à quelques kilomètres de Saint-Germain-en-Laye sur la route de Versailles et doit son nom aux « Arrêts de Marly » de 1711.

Cette année-là, le 6 juillet 1711, le roi Louis XIV proclame en son château de Marly-le-Roi deux « Arrêts du Conseil d’État du roi » établissant les bases du régime seigneurial en Nouvelle-France. De manière concrète, le roi de France et le gouvernement souhaitent poursuivre leur politique de limitation de l’exploration de nouvelles terres au Canada et en Amérique du Nord, au profit de défrichements et d’exploitation plus intense des terres déjà connues. Ils espèrent aussi encourager un peuplement plus important de la Nouvelle-France, qui, si elle a pour elle l’espace, est encore trop largement sous-peuplée. Ils espèrent enfin protéger les intérêts des différents habitants de la colonie.

Une page des Arrêts de Marly du 6 juillet 1711
Archives nationales à Paris, FR CHAN A1 46 pièces 33-34, fonds de la marine
JPEG - 54.6 ko
Un des douze pavillons du château de Marly
Manuscrit de Guillaumot Père, Gallica, BNF à Paris

Le premier « Arrêt de Marly » indique que les seigneuries non mises en valeur en Nouvelle-France seront retirées à leurs propriétaires et réunies au domaine royal. Le deuxième arrêt s’applique aux censitaires et les oblige aussi à mettre en valeur leur terre, qui, sinon, sera réunie au domaine seigneurial. De plus, les seigneurs ont l’obligation de concéder des terres à ceux qui en font la demande. Il leur est aussi interdit de vendre des censives non concédées. Toutes ces dispositions seront néanmoins très rarement appliquées, mais elles sont intéressantes à plus d’un titre car montrent une adaptation remarquable du vieux système féodal avec « l’entraide social érigée en système » (Marcel Trudel). En effet, alors que, comme le dit l’historien Guy Frégault, « seigneur et censitaires forment l’élément de base de l’organisation sociale du pays », ce régime, ajoute-t-il, « profite en fait davantage aux censitaires qu’aux seigneurs » et on trouve très souvent des habitants plus riches que le seigneur avec des censitaires qui rachèteront même des seigneuries. Ainsi, on peut dire que les deux Arrêts de Marly assurent la protection royale aux habitants contre les exactions des seigneurs, mais ils protègent aussi les seigneurs contre la négligence des habitants. Le roi de France définit ainsi équitablement les droits et devoirs de chacun, en arbitrant et en éventuellement sanctionnant par la déchéance. Le document est signé par Jérôme Phélypeaux de Pontchartrain, secrétaire d’État à la Marine de 1699 à 1715 et cousin d’Anne Phélypeaux, mère du gouverneur Frontenac.

Le château de Marly-le-Roi, où ont été proclamés ces arrêts, est construit de 1679 à 1684 en grande partie sur les plans de l’architecte Jules Hardouin-Mansart (né le 16 avril 1646 à Paris et mort le 11 mai 1708 à Marly-le-Roi), qui a notamment conçu la galerie des glaces du château de Versailles. Marly servait de résidence de loisirs pour le roi et sa cour, près de la grande forêt de Marly attenante. Le domaine était composé d’un bâtiment principal et de douze petits pavillons construits de part et d’autre d’un bassin. Être invité à Marly était un honneur et signifiait que l’on faisait partie des personnalités les plus proches de Sa Majesté. De grandes fêtes étaient organisées et on y trouvait également les ancêtres des jeux des parcs d’attractions contemporains, comme une « escarpolette » (grande balançoire) ou une « ramasse », sorte de montagne russe.

Délaissé après la mort de Louis XIV, le château est finalement démoli à partir de 1806 sous l’empereur Napoléon Ier. Il reste toutefois aujourd’hui l’immense parc classé « Domaine national » avec le musée-promenade de Marly-le-Roi-Louveciennes. Ce sont également toujours les Chevaux de Marly (dont les originaux se trouvent au Musée du Louvre dans la Cour Marly) qui ouvrent majestueusement l’avenue des Champs-Élysées au niveau de la place de la Concorde à Paris.

Le château de Marly-le-Roi, par Pierre-Denis Martin (1663-1742)
Musée du château de Versailles

Sites à consulter :

La rue de Marly dans le répertoire des noms des rues de la ville de Québec

Le boisé de Marly

Le boisé de Marly, guide des sentiers

Les Arrêts de Marly (archives nationales) dans Nouvelle-France horizons nouveaux

Reconstitution virtuelle du château de Marly

Site officiel du musée-promenade de Marly-le-Roi-Louveciennes

© Association Frontenac-Amériques. | SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0